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Parlez-vous le bolivarien ?
Ĉu vi parolas la bolivarian?

El Libertador (1783-1830), héros vénézuélien de la lutte contre les Espagnols, reste un mythe pour tout le continent sud-américain. De la théorie politique à l'enseigne commerciale, en passant par la monnaie vénézuélienne, nombre de lieux et bâtiments publics, et même des cigares, son nom est dans toutes les bouches, entre hommage à un fondateur et populisme exacerbé.

Places, rues, programmes sociaux ou hôpitaux… tout et rien au Venezuela se voit désormais accolé à l'adjectif "bolivarien". Dans ses discours, Hugo Chávez va jusqu'à substituer "Bolivariens" à "Vénézuéliens". Le choix du terme en dit beaucoup sur les priorités du leader de la "révolution bolivarienne".

"Toute notre inspiration, c'est Bolívar. Tout ce qui se passe aujourd'hui, c'est lui qui l'avait initié", explique Anastasio Rodríguez, professeur de droit à l'Université… bolivarienne de Caracas. Selon lui, il ne faut pas s'étonner des références fréquentes à Bolívar, tant au Venezuela que dans le reste de l'Amérique latine. "C'est lui qui a libéré le Venezuela et six autres pays du contrôle de l'Espagne", rappelle-t-il.

El Libertador (1783-1830), venezuela heroo de la lukto kontraŭ la Hispanoj, restas mito por la tuta sudamerika kontinento. De la politika teorio al la komerca ŝildo, inkluzivante la venezuelan monon, multe da lokoj kaj publikaj konstruaĵoj, kaj eĉ la cigarojn, lia nomo estas en ĉiuj buŝoj, inter omaĝo al fondinto kaj paroksisma demagogio.

Placoj, stratoj, sociaj programoj aŭ malsanulejoj... en Venezuelo, ĉio kaj nenio nun estas algluita al la adjektivo "bolivaria". En siaj paroladoj, Hugo Chávez eĉ anstataŭigas "Venezuelanoj" per "Bolivarianoj". La elekto de la termino multe informas pri la prioritatoj de la kondukanto de la "bolivaria revolucio". "Nia tuta inspiro devenas de Bolívar. Ĉion, kio hodiaŭ okazas, li komencis", klarigas Anastasio Rodríguez, profesoro pri juro en la Universitato... bolivaria de Karakaso.

Laŭ li, ne endas miri pri la oftaj referencoj al Bolívar, tiom en Venezuelo, kiom en la cetera latina Ameriko. "Li liberigis Venezuelon kaj ses aliajn landojn de la hispana kontrolo", li rememorigas.

On connaît quelques cas classiques de référence à Bolívar, comme celui de la Bolivie, qui doit son nom au célèbre révolutionnaire, qui a été le premier président de ce pays. Mais la véritable prolifération des usages du mot "bolivarien", on la doit à Hugo Chávez qui, depuis son accession au pouvoir en décembre 1998, a rendu "bolivariens" une kyrielle d'organes gouvernementaux. L'État n'y a pas échappé, passant de république du Venezuela à république bolivarienne du Venezuela. Pour Enrique Albana, journaliste à El Cambio, les multiples allusions au libérateur ne sont pas farfelues ou exagérées : "Ce sont nos racines. Aux États-Unis, on peut voir Washington sur les billets. Ici, on voit Simón Bolívar."

Selon lui, cette réforme s'inscrit dans une logique de rapprochement avec les valeurs fondamentales du pays. Et l'emploi multiple de l'adjectif "bolivarien" est investi d'un sens double : "reconnaître le travail, la volonté d'un homme qui est parvenu à libérer sept pays d'Amérique du Sud, et, plus largement, permettre aux Vénézuéliens de renouer avec leur origine de combattants".

Pour d'autres, cette propagation de l'utilisation de ce mot frôle le ridicule. Lenin Banderes est de ceux-là : "Aujourd'hui "bolivarien" au Venezuela, c'est synonyme de chaviste, explique-t-il. C'est devenu tellement répandu que ça manque de sens, parfois."

Viva Bolívar ! Vive le cigare libre ! Rejoignez-nous pour célébrer la Journée de Bolívar.

Oni konas kelkajn klasikajn kazojn de referencado al Bolívar, kiel tiun de Bolivio, kiu heredas sian nomon de la fama revoluciisto, unua prezidento de ĉi tiu lando. Sed la multiĝon de la vorto "bolivaria" kaŭzas Chavez, kiu, ekde kiam li akiris la povon, bolivari-igas kaskadon de registaraj organoj. La Ŝtato ne forfuĝas la emon, transnomiĝante de respubliko de Venezuelo al respubliko bolivaria de Venezuelo.

Por Enrique Albana, ĵurnalisto ĉe El Cambio, la multaj aludoj al la liberiginto ne estas absurdaj aŭ troaj. "Tie estas niaj radikoj. En Usono, Vaŝingtono videblas sur la biletoj. Ĉi tie, oni vidas Simón Bolívar."

Laŭ li, tiu reformo konformas la logikon de proksimiĝado kun la fundamentaj valoroj de la lando. Kaj la multobla uzado de la adjektivo "bolivaria" dusencas: "agnoski la laboron, la volon de iu homo, kiu sukcesis liberigi sep sudamerikajn landojn, kaj plilarĝe, helpi la Venezuelanojn retrovi sian devenon de batalantoj."

Laŭ aliuloj, la disvastiĝo de tiu vortuzado preskaŭ ridindas. Lenin Banderes anas tiujn homojn. "Hodiaŭ en Venezuelo, "bolivaria" samsignifas kiel "chavez-ana", li malkonfuzas. Tio estas tiom komuna, ke kelkfoje mankas senco."

Lenin Banderes n'est pas le seul que l'utilisation plurielle du mot "bolivarien" laisse dubitatif. Plus d'un y voit un autre stratagème populiste concocté par le gouvernement. Et Chávez ne manque pas une opportunité de faire référence à son modèle.

L'essentiel des politiques de Chávez pivote autour de deux thèmes : la justice sociale et l'union de l'Amérique du Sud. Deux thèmes que l'actuel chef d'Etat vénézuélien a défendus ardemment et dont il a fait la pierre d'assise des neuf campagnes électorales qu'il a menées et gagnées, bénéficiant chaque fois d'un appui massif des classes défavorisées.

Pour les milliers de Vénézuéliens qui bénéficient chaque jour de l'aide des nombreux programmes sociaux instaurés par Chávez, le mot "bolivarien" a donc tout un sens. C'est souvent celui qui identifie un hôpital, un marché, une clinique, où les soins et les services sont bon marché ou tout simplement gratuits... grâce au gouvernement bolivarien.

Ne nur Lenin Banderes iĝas dubema pro la plureca uzado de la vorto "bolivaria". Pli ol unu homo tie vidas plian populistan stratagemon bakitan de la registaro. Kaj Chávez ne maltrafas eĉ unu okazon por referenci al sia modelo.

La plejmulto el la politikoj de Chávez pivotas ĉirkaŭ du temoj: socia justico kaj unuiĝo de Sudameriko. Jen du temoj, kiujn la nuna venezuela ŝtatestro arde defendas, kaj sur kiuj li fondis la naŭ balotajn kampajniojn, kiujn li kondukis kaj gajnis, ĉiufoje ĝuante amasan subtenon de la malaltaj nefavoritaj klasoj.

Por la miloj da Venezuelanoj, kiuj ĉiutage ĝuas la helpon de la multaj sociaj programoj ekkreitaj de Chávez, la vorto "bolivaria" tute sencas. Ĝi ofte kvalifikas malsanulejon, merkaton, klinikon, kie la prizorgado aŭ la servoj estas malaltprezaj aŭ tutsimple senpagaj... dank' al la registaro bolivaria.

La politique étrangère du gouvernement Chávez se veut également inspirée par les idéaux d'El Libertador. Tout comme Bolívar qui, au début du XIXe siècle, désirait unir l'Amérique et les Caraïbes contre les forces royalistes espagnoles, Chávez prône une alliance sud-américaine pouvant faire face à l'"hégémonie américaine" et ainsi mener à terme le projet de Bolívar, deux siècles plus tard.

Simón Bolívar n'avait jamais réussi à concrétiser son projet d'union des pays sud-américains en une grande nation. En 1830, il abandonne son projet. Totalement désillusionné, il affirmera : "Celui qui sert la révolution laboure la mer."

Gaétan-P. Beaulière (CIPUF)

Ankaŭ la ekstera politiko de la registaro Chávez sin voleme inspiras el la idealoj de El Libertador. Same kiel Bolívar, kiu, komence de la dek-naŭa jarcento, deziris unuigi Sudamerikon kaj Antilojn kontraŭ la reĝaj hispanaj fortoj, Chávez rekomendas sudamerikan aliancon kiu kapablu alfronti la "amerikan hegemonion" kaj tiel finfari la projekton de Bolívar, du jarcentojn poste.

Simón Bolívar neniam sukcesis konkretigi sian projekton de unuigo de la sudamerikaj landoj en unu grandan nacion. En 1830, li forlasas sian projekton. Tute seniluziiĝinta, li asertas: "Kiu servas la revolucion, plugas la maron."

Gaétan-P. Beaulière (CIPUF)
Tradukis Guillaume Roussel

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